art et imitation

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     explication d'un texte d'Aristote

« Imiter est naturel aux hommes et se manifeste dès leur enfance (l’homme diffère des autres animaux en ce qu’il est très apte à l’imitation et c’est au moyen de celle-ci qu’il acquiert ses premières connaissances) et, en second lieu, tous les hommes prennent plaisir aux imitations. Un indice est ce qui se passe dans la réalité : des êtres dont l’original fait peine à la vue, nous aimons à en contempler l’image exécutée avec la plus grande exactitude ; par exemple, les formes des animaux les plus vils et des cadavres. Une raison en est encore qu’apprendre est très agréable non seulement aux philosophes, mais pareillement aussi aux autres hommes ; seulement ceux-ci n’y ont qu’une faible part. On se plaît à la vue des images parce qu’on apprend en les regardant, et on déduit ce que représente chaque chose, par exemple que cette figure c’est un tel. Si on n’a pas vu auparavant l’objet représenté, ce n’est plus comme imitation que l’œuvre pourra plaire, mais à raison de l’exécution, de la couleur ou d’une autre cause de ce genre. »

Aristote, Poétique, 1448 b 6-19


 

Le texte commence par une distinction entre l’homme et l’animal. Seul l’homme est capable d’imiter au sens où il ne possède aucun instinct. A ce titre il n’est pas conditionné par des automatismes mais fait preuve d’initiative et de liberté. L’imitation lui permet d’acquérir ses premières connaissances.

Il y a ainsi un pouvoir de l’imitation que ce texte engage à examiner..pouvoir qui fait de nous les êtres les plus naturels de la nature…à ce titre Aristote refuse l’oppostion technique et nature…

 

Comme nous venons de le souligner, l’imitation est manifestation de la liberté humaine. Aristote réfute ainsi la position de Platon qui réduisait l’imitation à la copie et donc à un certain asservissement de l’homme. Il qualifiait celle-ci de jeu sophistique des illusions.
Cette imitation est naturelle à l’homme, par conséquent il ne peut y échapper ..mais pour achever son propre monde…

 

L’art est le propre de l’homme

 L’homme imite par une action libre, et l’artiste est seul responsable de son œuvre. C’est pourquoi le principe de mouvement est interne aux œuvres de la nature, mais il est externe aux œuvres de l’art, car il n’appartient pas à l’œuvre elle-même, mais au choix du “poète” qui lui a donné naissance. « L’art (humain) imite la nature, ê tekhnê mimeitai tên phusin » (Phys, 194 a 21) : comprendre que l’œuvre de l’homme supplée aux défaillances de la nature, il parfait ce qui demeurait inachevé, il porte dans la plénitude de sa forme ce qui sommeillait en puissance dans la matière. « L’art achève ce que la nature n’a pu mener à bien » (Phys., II, 8, 199 a 15-17)  . Les êtres naturels imitent par un mouvement inconscient, qui les porte d’eux-mêmes vers leur fin, c'est-à-dire vers l’accomplissement de leur nature. L’homme au contraire participe activement et intelligemment à ce travail d’imitation qui fait l’unité de l’univers tout entier. C’est en l’homme seulement que la nature réalise son œuvre la plus accomplie, qu’elle enfante un vivant qui participe, de lui-même, à ce mouvement, dont la nature est le principe, et qui porte toute existence vers sa fin, c'est-à-dire vers l’achèvement de sa forme. « Par exemple, si une maison était chose engendrée par nature, elle serait produite de la façon dont l’art en réalité la produit ; et si les choses naturelles n’étaient pas produites par la nature seulement, mais aussi par l’art, elles seraient produites par l’art de la même manière qu’elles le sont par la nature » (Phys, II, 8 199 a 12-15). Ou bien encore : « Il en est des êtres naturels comme des productions de l’art (sunistamena, les choses assemblées) : la semence joue, en somme, le rôle de l’artiste, car elle a, en puissance, la forme » (Mét, Z, 9, 1034 a 33-35).
            Il apparaît alors que l’homme, qui a vocation à être artiste, qui a pour ainsi dire la responsabilité de la production de l’œuvre, est le plus “naturel” des êtres de la nature. En effet, tout être naturel tend de lui-même vers la fin qui lui est propre, le feu vers la hauteur, la rose vers l’éclosion et le cheval vers le galop. L’homme inversement n’a d’autre fin propre que d’œuvrer à la finalité qui s’accomplit dans la nature, de porter ce qui n’est encore qu’en puissance dans la perfection de ce qui s’accomplit en acte, de parachever l’inachevé ou le manqué, l’avorton ou le monstre qui déparent l’œuvre défaillante de la nature

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            « Imiter est naturel aux hommes, et se manifeste dès leur enfance (l’homme diffère des autres animaux en ce qu’il est très apte à l’imitation — mimêtikôtaton — et c’est au moyen de celle-ci qu’il acquiert ses premières connaissances) et, en second lieu, tous les hommes prennent plaisir aux imitations» (Poét, 48 b 5).

Cette propriété marque, selon Platon, un défaut en la nature de l’homme, elle est l’effet de cet éblouissement du vrai auquel, en tant qu’hommes, nous sommes assujettis : à défaut de la vision directe, nous passerons par la médiation de la représentation. Cette même propriété marque, selon Aristote, la grandeur de notre nature . C’est sur le thème de la ressemblance — qui est la fin de toute imitation — que l’opposition des deux penseurs est la plus manifeste. La ressemblance est selon Platon un genre “glissant”, qui induit l’esprit à l’erreur : par le jeu des ressemblances, il n’est rien qui ne puisse paraître vrai. L’art de tromper est « l’art de faire passer insensiblement les autres de ressemblance en ressemblance » (Phèdre, 262 b). C’est ainsi, explique Socrate, « pour changer de côté sans qu’on s’en aperçoive, on y arrive mieux en se déplaçant à petits pas qu’à grands pas » (262 a). La ressemblance corrompt insidieusement la droite raison, et le raisonnement par analogie est déraison. Pour Aristote, la ressemblance est au contraire le principe même de la création poétique. L’animal mimétique par excellence est, plus que tout autre, apte à saisir les ressemblances. Le langage poétique exprime par métaphores ces relations d’analogies qui donnent à l’univers son unité et démontrent l’universalité du principe d’imitation : le génie mimétique de l’artiste a le pouvoir démiurgique d’enfanter un monde et de recréer la nature.


            La faculté mimétique fait de l’homme le seul poète,
un créateur de formes à l’égal de la nature, un vivant autonome, nature dans la nature et presque « empire dans un empire » (Spinoza). Cette responsabilité — qui fait l’homme maître de ses propres choix, non pas de façon arbitraire, mais en conformité avec le principe d’imitation qui gouverne la nature — n’est peut-être pas sans rapport avec la représentation tragique elle-même. Qu’est-ce en effet qu’une tragédie sinon une situation critique, qui se noue à la limite de l’insupportable? Il appartient alors à l’homme, par une action volontaire, de “dénouer” cette faute et de rétablir l’équilibre naturel des choses qu’une faute ancienne avait dangereusement troublé. Les monstres, qui sont dans la nature les “fautes de la finalité”, proviennent, selon Aristote, d’une “semence viciée” : c’est ainsi qu’une faute ancienne corrompt dès l’origine la descendance malheureuse des Atrides, ou celle des Labdacides. Seul l’homme, animal politique et doué de parole, responsable de ses choix, peut alors résoudre la tension. Le héros tragique, comme l’artiste qui conduit la forme à son achèvement, comme le sage qui, par la vie contemplative, connaît la béatitude de l’immortel, comme l’homme politique qui veille sur l’autonomie de la cité, met fin à la guerre qui troublait l’ordre du monde et rétablit la paix que tous désirent, la paix et la sérénité divines que toute existence s’efforce d’imiter :« Car nous ne nous adonnons à une vie active qu’en vue d’atteindre le loisir, et ne faisons la guerre qu’afin de vivre en paix » (Nic, X, 7, 1177 b 5). C’est ainsi que le conflit tragique, qui trouble provisoirement l’ordre de l’univers, se résout dans la paix quand tout est accompli. Tel est peut-être en effet le sens de la catharsis tragique : rétablir l’harmonie au sein de l’univers et résoudre le conflit qui troublait la finalité. La représentation tragique, mimétique elle-même, met donc en lumière la grandeur mimétique de l’animal doué de raison, seul capable de soigner les monstruosités qui troublent l’histoire des hommes, et de porter cette histoire jusqu’à la fin naturelle qui la réconcilie avec elle-même. Il ne suffit donc pas de dire que la tragédie est mimêsis, représentation : elle est mimêsis du plus mimétique des êtres naturels, elle rend manifeste cette puissance mimétique qui fait de l’homme ce vivant autonome appelé à participer, par un libre choix, à l’œuvre de finalité qui règne dans la nature.

La beauté de la représentation tient à cette cohésion dramatique qui confère à l’œuvre l’unité d’un organisme vivant, c'est-à-dire doué d’autonomie. Le muthos tragique est une histoire qui semble pour ainsi dire fonctionner toute seule et marcher de son propre pas (un automate), à la façon des êtres naturels qui possèdent en eux le principe de leur propre mouvement. Le lien, plus tard souligné par Kant, entre la finalité interne du vivant et la finalité sans fin de la belle représentation, est au cœur de la poétique aristotélicienne : « Puisque le bel animal et toute belle chose composée de parties suppose non seulement de l’ordre dans ces parties mais encore une étendue qui ne soit pas laissée au hasard, car la beauté réside dans l’étendue et dans l’ordre [...] il s’ensuit que, de même que pour les corps et pour les animaux il faut une certaine grandeur, telle qu’on puisse aisément l’embrasser du regard, de même pour les fables (muthos) il faut une certaine étendue, telle que la mémoire puisse aisément la saisir » (50 b 35). Même image plus loin : « Il faut, dans les tragédies, composer le muthos de façon qu’il soit dramatique (dramatikos) et tourne autour d’une seule action, entière et complète ayant un commencement (archê) et un milieu (mesos) et une fin (telos), afin que comme un animal par l’unité du tout (en olon), elle procure le plaisir qui lui est propre » (59 a 17).

Ainsi faut-il comprendre cette phrase du texte :

. « Un indice est ce qui se passe dans la réalité : des êtres dont l’original fait peine à la vue, nous aimons à en contempler l’image exécutée avec la plus grande exactitude ; par exemple, les formes des animaux les plus vils et des cadavres. »

Les formes..écrit Aristote..c’est justement ce qui met en ordre la matière. L’artiste introduit l’harmonie..le beau, par son travail sur la matière.


          Pour Aristote est belle l’œuvre en voie d’accomplissement, révélée par le mouvement même de sa réalisation. Pour lui la beauté est un événement qui se manifeste dans le temps, et qu’on ne saurait dissocier du processus qui lui donne naissance. C’est aussi en ce sens que la tragédie est “poétique” : elle est une œuvre en devenir, et qui n’existe véritablement que dans le temps de sa représentation, qui s’identifie à l’histoire de son accomplissement.
            L’autonomie de l’œuvre commande la cohésion de ses parties et l’unité de l’ensemble. De toutes les œuvres de l’art, la tragédie est sans doute la plus “mimétique”, c'est-à-dire la plus expressive de cette autonomie qui est le propre de l’homme, l’animal mimétique par excellence. Plus que tout autre œuvre en effet, la tragédie est une, ramassée dans son unité avec une concision et une économie exemplaires : « La tragédie s’efforce de s’enfermer, autant qu’il est possible, dans le temps d’une seule révolution du soleil, ou de ne le dépasser que de peu, tandis que l’épopée n’est pas limitée dans le temps » (49 b 13-14). L’épopée, qui n’est pas soumise à l’impératif de la représentation scénique, peut évoquer diverses actions simultanées ; la tragédie au contraire, ne peut en montrer qu’une. Plus profondément, l’épopée, qui chante l’ivresse de la victoire et le triomphe des héros, ne saurait admettre sa fin, elle ne saurait se résigner à finir. L’Iliade n’a ni commencement — la guerre précédait la colère d’Achille — ni fin — la guerre reprendra après les funérailles d’Hector. Admettre sa fin, ce serait pour l’épopée admettre sa limitation, et par conséquent son échec : l’épopée dit le triomphe illimité de la bravoure sur la mort. C’est pourquoi la fin de l’Iliade (la ruse du cheval) se trouve dans l’Odyssée : l’épopée ne peut trouver qu’en dehors d’elle-même la raison de son achèvement. A la démesure épique, s’oppose alors la mesure tragique : quintessence de l’art mimétique, la tragédie rassemble toute la force de la représentation dans les strictes limites que son autonomie, c'est-à-dire son unité, exige. Dans la tragédie, le temps est compté : son exploit, indéfiniment renouvelé, n’exalte pas indéfiniment le héros, il le passionne au contraire , et le détruit. Ainsi Prométhée souffrant devant nous par l’acte qu’il revendique pourtant hautement. L’acte tragique se consume lui-même par l’effet qu’il provoque ; l’acte épique se nourrit au contraire de lui-même dans un élan toujours perpétué. C’est pourquoi la tragédie soumet la représentation à un principe rigoureux d’unité, qui la limite exactement. Pour Aristote, cette limitation n’est nullement un appauvrissement de l’œuvre, mais au contraire le principe de sa perfection. A transposer la mesure tragique dans la démesure épique, on en épuiserait toute la force : « La tragédie a encore l’avantage de réaliser parfaitement l’imitation de moindre étendue ; car on aime mieux ce qui est resserré que ce qui est dispersé sur un long temps : supposons, par exemple, qu’on transpose l’Œdipe de Sophocle en autant de vers qu’il y en a dans l’Iliade ! » (62 b 1).
            A elle-même sa propre fin, autonome, la représentation tragique est donc absolument une. L’âge classique le répétera : la tragédie doit obéir à la règle de l’unité. Reste à déterminer le principe de cette unité poétique : l’unité de lieu n’est pas mentionnée par Aristote, l’unité de temps est à peine évoquée (dans le passage cité plus haut : “une seule révolution du soleil”). Seule l’unité d’action est, selon Aristote, déterminante. La tragédie n’est pas seulement mimêsis : elle est “mimêsis praxeôs”, représentation d’un acte. Le muthos, qui est l’enchaînement des actions, est  “le principe et comme l’âme de la tragédie” (50 a 38).  L’action, sa nécessité, son rythme, donne à la tragédie sa mesure véritable.

Une raison en est encore qu’apprendre est très agréable non seulement aux philosophes, mais pareillement aussi aux autres hommes ; seulement ceux-ci n’y ont qu’une faible part. On se plaît à la vue des images parce qu’on apprend en les regardant, et on déduit ce que représente chaque chose, par exemple que cette figure c’est un tel.

Les images nous dit encore Aristote ont une puissance pédagogique. Elles forment ainsi l’esprit à la déduction c'est-à-dire à l’univers de la démonstration.

 

De tout cela il ressort clairement que l’artiste s’il est imitateur n’est nullement un copiste

 

texte à mettre en perspective avec ce texte de Hegel :

 

« C'est un vieux précepte que l'art doit imiter la nature ; on le trouve déjà chez Aristote.[...] D'après cette conception, le but essentiel de l'art consisterait dans l'imitation, autrement dit dans la reproduction habile d'objets tels qu'ils existent dans la nature, et la nécessité d'une pareille reproduction faite en conformité avec la nature serait une source de plaisirs. Cette définition assigne à l'art un but purement formel, celui de refaire une seconde fois, avec les moyens dont l'homme dispose, ce qui existe dans le monde extérieur, et tel qu'il y existe. Mais cette répétition peut apparaître comme une occupation oiseuse et superflue, car quel besoin avons-nous de revoir dans des tableaux ou sur la scène, des animaux, des paysages ou des événements humains que nous connaissons déjà pour les avoir dans nos jardins, dans nos intérieurs ou dans certains cas, pour en avoir entendu parler par des personnes de nos connaissances? On peut même dire que ces efforts inutiles se réduisent à un jeu présomptueux dont les résultats restent toujours inférieurs à ce que nous offre la nature. C'est que l'art, limité dans ses moyens d'expression, ne peut produire que des illusions unilatérales, offrir l'apparence de la réalité à un seul de nos sens ; et, en fait, lorsqu'il ne va pas au-delà de la simple imitation, il est incapable de nous donner l'impression d'une réalité vivante ou d'une vie réelle : tout ce qu'il peut nous offrir, c'est une caricature de la vie...
C'est ainsi que Zeuxis peignait des raisins qui avaient une apparence tellement naturelle que les pigeons s'y trompaient et venaient les picorer, et Praxeas peignit un rideau qui trompa un homme, le peintre lui-même. On connaît plus d'une histoire d'illusions créées par l'art...
On peut dire d'une façon générale qu'en voulant rivaliser avec la nature par l'imitation, l'art restera toujours au-dessous de la nature et pourra être comparé à un ver faisant des efforts pour égaler un éléphant. Il y a des hommes qui savent imiter les trilles du rossignol, et Kant a dit à ce propos que, dès que nous nous apercevons que c'est un homme qui chante ainsi, et non un rossignol, nous trouvons ce chant insipide. Nous y voyons un simple artifice, non une libre production de la nature ou une œuvre d'art. Le chant du rossignol nous réjouit naturellement, parce que nous entendons un animal, dans son inconscience naturelle, émettre des sons qui ressemblent à l'expression de sentiments humains. Ce qui nous réjouit donc ici, c'est l'imitation de l'humain par la nature...
Il est permis de soutenir dès maintenant que le beau artistique est plus élevé que le beau dans la nature. Car la beauté artistique est la beauté née et comme deux fois née de l'esprit. Or autant l'esprit et ses créations sont plus élevés que la nature et ses manifestations, autant le beau artistique est lui aussi plus élevé que la beauté de la nature. Même, abstraction faite du contenu, une mauvaise idée, comme il nous en passe par la tête, est plus élevée que n'importe quel produit naturel ; car en une telle idée sont présents toujours l'esprit et la liberté. »

Hegel, L'Esthétique

 on retiendra de ce texte de Hegel que la nature n'étant que confusion, il s'agit de rompre avec elle, et d'y introduire le beau sous la forme de l'esprit... 6468962581_5724ab7736.jpg

 http://static.blogstorage.hi-pi.com/photos/mocasaki.rmc.fr/images/gd/1171531353/analyse-d-un-tableau-Que-recherche-le-peintre-en-representant-des-objets.jpgc'est un tableau de Baugin peintre du XVII ème siècle d'origine Hollandaise.

Nature morte à l'échiquier.

plusieurs objets apparaissent sur cette toile :

un luth (instrument de musique)

une partition

un jeu de cartes

une bourse

une perle ovale

un pain

une coupe de vin

trois oeillets

un échiquier

un miroir

 

Importance de la mise en scène du tableau : image structurée par des verticales (les pans de mur), des horizontales (bord de la table) et des obliques qui entraînent notre regard à l'intérieur du tableau. Les couleurs sont essentiellement chaudes à gauche (ocre, jaune, rouge) et froides à droite. Opposition aussi de la lumière(gauche) et du sombre (droite).

Si notre regard s'attarde quelques instants au premier plan sur le luth, il se déplace très vite vers le pain, la coupe de vin transparente et le bouquet d'oeillets.

Paradoxalement, ce sont les objets les plus modestes qui retiennent notre attention.

Cette nature morte sollicite nos cinq sens : la vue (miroir), l'ouïe (luth), l'odorat (oeillets), le goût (pain, vin), le toucher (échiquier, carte, bourse).

Ce tableau porte d'ailleurs un autre titre : les cinq sens

Signification du tableau :

 

Il est indispensable de replacer cette toile dans son contexte historique pour en découvrir la véritable signification. Peinte au XVII ème siècle, cette nature morte sollicite tous nos sens. Or le XVII ème siècle est profondément croyant ; et le rôle de l'artiste est de nous rappeler que notre vie terrestre n'est qu'un passage. La recherche de l'Absolu prime avant tout. C'est précisément le message que nous délivre ce tableau : l'Instrument de musique, le jeu de cartes, l'échiquier, c'est le monde de l'oisiveté, du divertissement.

La bourse, la perle, c'est l'univers de l'argent, du luxe et de la sensualité.

Le miroir, c'est le symbole de la vanité.

Le peintre condamne tous ces objets qui nous entraïnent sur le chemin dela futilité.

Au contraire,notre regard est attiré vers le pain, la carafe de vin, les oeillets . Pourquoi ?

 

Le PAIN et le VIN sont chargés, au XVII ème siècle, de connotations sacrées. Iles renvoient au repas eucharistique. Quant aux OEILLETS , ils symbolisent au XVII ème siècle l'amour sacré.

En conclusion :

 

Cette nature morte du XVII ème siècle n'a donc pas qu'une fonction décorative. Il s'agit pour le peintre de nous amener à dépasser le monde du profane.

 

Nicolas Poussin (1594-1665) 'Les bergers d'Arcadie'

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Le contenu peut être tout à fait indifférent et ne présenter pour nous, dans la vie ordinaire, en dehors de sa représentation artistique, qu'un intérêt momentané. C'est ainsi, par exemple, que la peinture hollandaise a su recréer les apparences fugitives de la nature et en tirer mille et mille effets. Velours, éclats de métaux, lumière, chevaux, soldats, vieilles femmes, paysans répandant autour d'eux la fumée de leurs pipes, le vin brillant dans des verres transparents, gars en vestes sales jouant aux cartes, tous ces sujets et des centaines d'autres qui, dans la vie courante, nous intéressent à peine, car nous-mêmes, lorsque nous jouons aux cartes ou lorsque nous buvons et bavardons de choses et d'autres, y trouvons des intérêts tout à fait différents, défilent devant nos yeux lorsque nous regardons ces tableaux.
Mais ce qui nous attire dans ces contenus, quand ils sont représentés par l'art, c'est justement cette apparence de cette manifestation des objets, en tant qu'œuvres de l'esprit qui fait subir au monde matériel, extérieur et sensible, une transformation en profondeur. Au lieu d'une laine, d'une soie réelles, de cheveux, de verres, de viandes et de métaux réels, nous ne voyons en effet que des couleurs, à la place de dimensions totales dont la nature a besoin pour se manifester nous ne voyons qu'une simple surface, et, cependant, l'impression que nous laissent ces objets peints est la même que celle que nous recevrions si nous nous trouvions en présence de leurs répliques réelles...3406664666_388b2d372d.jpg
Grâce à cette idéalité, l'art imprime une valeur à des objets insignifiants en soi et que, malgré leur insignifiance, il fixe pour lui en en faisant son but et en attirant notre attention sur des choses qui, sans lui, nous échappaient complètement. L'art remplit le même rôle par rapport au temps et, ici encore, il agit en idéalisant. Il rend durable ce qui, à l'état naturel, n'est que fugitif et passager ; qu'il s'agisse d'un sourire instantané, d'une rapide contraction sarcastique de la bouche, ou de manifestations à peine perceptibles de la vie spirituelle de l'homme, ainsi que d'accidents et d'événements qui vont et viennent, qui sont là pendant un moment pour être oubliés aussitôt, tout cela l'art l'arrache à l'existence périssable et évanescente, se montrant en cela encore supérieur à la nature.

Esthétique

Publié dans art

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